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Eva Kuper

Le souvenir de Fela

Le portrait ci-dessous est celui de la mère d’Eva Kuper, pris au milieu des années 1930. Chaque jour, Eva pense à sa mère, Fela, dont elle a été séparée très jeune, assassinée à Treblinka (Pologne occupée) en 1942. La photographie lui vient de sa tante, émigrée en Amérique avant la guerre. Le cadre, fabriqué par la fille d'Eva, Felicia, du nom de sa mère disparue, contient des glands et des châtaignes ramassés en 2005 sur le sol de Treblinka. Le cadre et la photographie établissent ainsi un lien mémoriel sensible entre les trois générations.

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C’est une photo de ma mère prise probablement au milieu des années 1930. Si je l’ai, c’est parce que sa
sœur, tante Gertrud, avait émigré en Amérique et vivait à New York pendant la guerre, et que mon père
lui envoyait des photos. C’est ainsi que toutes les photos que j’ai — et j’en ai plusieurs — datent de
cette époque et n’existent que parce que ma tante les a conservées. Sinon, je n’ai rien. Je vous raconte
pourquoi la photo est encadrée comme ça. En 2005, ma fille Felicia et moi sommes allées en Pologne sur
les traces de notre histoire familiale. Un des moments les plus émouvants, c’est quand on a visité
Treblinka, où ma mère a été assassinée. Je suis passée à un cheveu de subir le
même sort. On a traversé Treblinka, toutes les deux en pleurs, en portant des bougies commémoratives
qui avaient été décorées par les enfants de mon autre fille, ici, à Montréal. Ils étaient très jeunes à
l’époque. On a allumé les bougies et on a marché. Ma fille Felicia a beaucoup de talent artistique, et elle
a ramassé toutes sortes de choses sur le terrain de Treblinka, comme ces glands et ces marrons. Quand
on est rentrées, elle les a assemblés et m’a envoyé ce cadre. Je le garde sur ma commode. Je le regarde
tous les jours et je pense à ma mère — ce que je ne faisais que rarement quand j’étais plus jeune. J’ai
commencé à vouloir préserver la mémoire familiale lorsque j’ai eu des enfants, qu’elles ont grandi et
quand cette même fille, Felicia, qui porte le nom de ma mère, m’a incitée à me pencher sur notre
histoire et son influence sur notre famille : sur moi, mes enfants, et sur mon père, ma belle-mère et
toute notre famille.

Fishel Goldig
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