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Leo Dortort

Franz et Anna

Leo Dortort n’a que très peu de photographies de ses parents Franz et Anna. Celles ci-dessous ont été prises au début des années 1920. Anna se trouve alors à Graz (Autriche) alors que Franz est photographié à Bratislava (Slovaquie). Après leur mariage, les parents de Léo possèdent une mercerie ainsi qu’un commerce de modiste. En 1941, au terme d’une longue fuite, Franz est tué à Šabac (Serbie) et Anna, au camp de concentration de Sajmište (Serbie). Orphelin, Léo est envoyé en Palestine où il retrouve sa sœur.

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Commençons par cette photo.

C’est ma mère, avant son mariage. Elle a quitté Budapest (en Hongrie) après la Première Guerre mondiale parce sa famille était déjà à Graz (en Autriche), sa mère était là. Mon père est d’abord allé à Bratislava (aujourd’hui en Slovaquie), où il a travaillé un certain temps, puis est venu à Graz, où mes parents se sont mariés. Il travaillait comme imprimeur et avait un ami qui avait une imprimerie. Alors, quand ma mère a déménagé à Graz, il est parti en Slovaquie, à Bratislava, puis ensuite à Graz. Ma sœur est née en 1924 et moi, en 1928.

Combien de temps êtes-vous resté à Graz?

Dix ans et demi, environ, à partir de ma naissance.

Qu’est-il arrivé après?

Graz est à 20 kilomètres de la frontière yougoslave. Le frère aîné de ma mère avait fui un peu plus tôt. Il a payé des passeurs, et on est partis, avec mes parents et deux frères de ma mère. La Yougoslavie a accepté officiellement qu’on y reste. Mais on n’avait pas de papiers, rien. La communauté juive était censée s’occuper de nous. Puis, il y a eu ce communiqué nous informant qu’il y avait un transport clandestin vers la Palestine pour lequel il y avait encore 150 places. On est arrivés à Belgrade (aujourd’hui en Serbie), mais personne ne nous y attendait. La police est venue, des inspecteurs, qui nous ont emmenés pour la nuit à Kladovo (aujourd’hui en Serbie). Nous y sommes restés quelques mois, puis ils ont déplacé tout le groupe dans une plus grande ville appelée Šabac (aujourd’hui en Serbie). Les Allemands ont emmené environ 5000 Yougoslaves et, avec ce groupe, ils ont pris tous les hommes du voyage et les ont tués. Mon père a été assassiné là-bas.

Les femmes ont été emmenées à un autre endroit, près de Belgrade, où ils avaient transporté un de ces camions à gaz de Pologne. Ils les ont tuées dans le camion. Mais ma mère ne figure pas sur la liste. Quand j’étais à Belgrade, j’ai découvert qu’elle était sur la liste de Brčko (aujourd’hui en Bosnie-Herzégovine). Brčko était un village où 200 réfugiés autrichiens étaient hébergés et où se trouvaient tous les frères et sœurs de ma mère. C’est terrible ce qu’ils ont fait à Brčko. En décembre 1941 ou 1942, je ne me souviens plus, ils sont venus un jour et ont pris les 200 Autrichiens et les 100 Juifs de Yougoslavie. Brčko est sur la rivière Sava. Ils les ont fait monter sur le pont, qu’ils ont refermé, et les ont tués à coups de marteau.

Léon Celemencki
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