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Margaret Kaufman Newman

Les alliances de Margaret et Samuel

En avril 1945, le camp de Buchenwald (Allemagne) est libéré. Margaret Kaufman Newman, alors prisonnière, trouve parmi les biens abandonnés par les SS une boîte de bijoux. De celle-ci, elle ne garde qu’une montre et une alliance. Quelques mois plus tard, de retour chez elle à Satu Mare (Roumanie), elle épouse Samuel son amour d’avant-guerre. Alors que les futurs mariés n’ont pas d’argent pour s’acheter des alliances, Margaret fait couper l’alliance trouvée en deux nouvelles, celles que l’on peut voir ci-dessous. Elle y fait inscrire leurs noms et leur date de mariage.

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J’étais à Buchenwald. C’était après la libération, et tout le monde pouvait avoir quelque
chose. Ils ramassaient les bijoux, toutes sortes de choses, dans une grosse boîte. Ils nous ont dit qu’on
pouvait prendre ce qu’on voulait. Mes amis et moi, on y est allés, et j’ai dit : « Je vais prendre la grosse
bague. Et une montre ». La montre, je l’ai donnée à mon frère quand je suis rentrée, mais j’ai gardé la
bague. Lorsque mon mari est revenu et qu’on a décidé de se marier, on n’avait pas d’argent. Alors, on a
fait couper la bague en deux. Ces deux bagues viennent d’une seule bague. J’avais un cousin qui n’était
pas allé à la guerre et qui était bijoutier. Il a mis l’insigne, les noms et la date, le mariage et le nom…
Qu’est-il écrit à l’intérieur?
C’est écrit la date de notre mariage, le 12 novembre 1945, et il y a mon nom. Moi, j’avais son nom.
Où avez-vous rencontré votre mari?
Je le connaissais presque depuis ma naissance. On vivait dans la même rue. On a déménagé sur une
autre rue, et eux aussi, à deux coins de rue de chez nous, à l’autre bout de la même rue. Il était aussi
l’ami de mon frère.
Où et quand vous êtes-vous mariés?
À Szatmár (aujourd’hui Satu Mare), en 1945. Quand je suis rentrée, j’étais très déçue. Je
ne m’intéressais à personne, à rien. Je n’avais envie de rien. Mon mari est revenu plus tard. Je ne savais
même pas s’il était vivant. On avait encore des amis, dont certains étaient revenus de la guerre, et l’un
d’eux est venu me dire que Picu était rentré. J’ai répondu : « La belle affaire! » Le gars a dit : « Il veut te
voir. » « Moi, je ne veux pas le voir. Je ne veux voir personne. » Mais il est venu et il m’a demandé : « Tu
ne m’aimes plus? » Je lui ai répondu : « Je ne sais pas ! » Sa sœur était déjà là, et je suis allée vivre avec
elle. Et on s’est mariés en novembre. On a fait le mariage à la maison, où on a reçu 100 personnes pour
le repas, tous des amis du camp. Un mois plus tard, on s’est dit : « Ce n’est pas pour nous, ici. » Et on a
décidé de partir. J’ai laissé la clé dans la porte et je suis partie. On a traversé la frontière vers la Hongrie
en pleine nuit. Et je ne suis jamais retournée.

Margrit Stenge
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Margrit Stenge

Le souvenir d’une vie cachée