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Ernest Ehrmann

Le talmud paternel

Il ne reste presque plus rien de la maison familiale d’Ernest Ehrmann. Elle a été pillée suite à la déportation de la famille à Auschwitz (Pologne occupée). De retour chez lui après la guerre, Ernest ne parvient à récupérer que quelques volumes du Talmud qui appartenaient à son père. Il les retrouve sur un tas de fumier. Son frère et lui écoulent toutes leurs économies pour les faire livrer au Canada. Aujourd’hui, ces livres sauvés, dont l’un des volumes se trouve ci-dessous, accompagnent les lectures d’Ernest à Montréal.

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Voici le Talmud, qu’on appelle Shas en hébreu. J’ai été libéré le 1 er mai 1945. Quand je suis finalement
rentré dans ma ville d’origine, j’ai voulu savoir ce qu’il en restait et qui était encore là. On possédait
beaucoup d’immeubles. On avait un restaurant kasher, un restaurant non kasher, un hôtel — mon père
était riche, mon père et ma mère. Vous savez, quand on a un hôtel, un petit hôtel, dans une petite ville,
on est considérés comme riches. Évidemment, à notre retour, tout avait disparu, tout avait été
cambriolé, il ne restait que les murs nus. Les meubles avaient disparu, même les tapis avaient disparu.
On avait une longue cour et, tout au fond, un fermier élevait des vaches et des chevaux. Le terrain nous
appartenait aussi, mais mon père le lui louait. Alors, je suis allé dans la cour, là où se trouvait le fermier,
et j’ai vu une grande décharge de fumier. C’est là que j’ai trouvé ceci et tous les livres que je vous ai
montrés. C’est tout ce qu’il me reste de mon père, un Shas, un Talmud. Il manque trois ou quatre
volumes, mais c’est ce qui restait de notre maison. C’est mon unique souvenir de mon père. Quand on a
eu nos visas pour le Canada, j’ai voulu le prendre avec nous. Il y avait une compagnie maritime, et les
livres ont été placés dans une boîte en bois… Il fallait payer pour le transport. Ça a été très longtemps
avant que ça n’arrive au Canada, sur le navire de marchandises. J’avais dépensé mes dernières
économies, même mon oncle a dû m’aider, car je n’avais pas assez d’argent.

Eva Kuper
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Eva Kuper

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